Yury Vilk et moi-même avons développé une nouvelle approche au problème à N-corps pour les modèles à courte portée (modèle de Hubbard). Cette approche, dont les détails ont été publiés en 1997 , est basée sur la nécessité de satisfaire les lois de conservation, le principe de Pauli et plusieurs règles de somme importantes. Cette approche satisfait aussi le théorème de Mermin-Wagner en deux dimensions.
L'effet des modes collectifs sur les propriétés à une particule est obtenu à l'aide d'une formule de type paramagnon qui est cohérente avec les propriétés à deux particules dans le sens qu'on obtient la même énergie potentielle peu importe le point de départ. Comme le théorème de Migdal ne s'applique pas pour les corrections de vertex, celles-ci sont incluses. La théorie est en accord quantitatif avec les simulations Monte Carlo.
Les prédictions principales sont a) Un diagramme de phase magnétique où l'ordre persiste au-delà du demi-remplissage mais où le ferromagnétisme de Stoner est complètement absent. Les comportements critiques quantiques et classique renormalisés sont ceux du modèle sphérique. b) Dans le domaine classique renormalisé, les fluctuations de spin produisent des précurseurs des bandes antiferromagnétiques (bandes fantômes) et détruisent les quasiparticules du liquide de Fermi sur une grande plage de température au-dessus de la transition de phase à température nulle. Ce phénomène est illustré dans le rapport de 1996 . La dimension critique supérieure pour ce phénomène est trois. Les fluctuations de paire dans les modèles attractifs peuvent mener à des effets physiques analogues.
Ces effets précurseurs sont directement reliés à la question de l'existence du célèbre régime "pseudogap" dont la littérature sur les supraconducteurs à haute température fait abondamment état.
La méthode que nous avons développée est la seule qui permette d'obtenir, sans paramètre ajustable, un bon estimé de la température critique et des fluctuations de spin pour le modèle de Hubbard bi-dimensionnel en régime de couplage faible à intermédiaire. Notre approche permet aussi d'avoir accès aux propriétés à une particule. Nous utilisons cette approche dans plusieurs projets.
Nous continuons de développer cet outil précieux qui nous permet de constamment vérifier la validité de nos approches et d'explorer des domaines de paramètres inaccessibles aux méthodes analytiques. Le programme a été réécrit en Fortran 90 et restructuré par Hugo Touchette en 1996. En 1998 David Poulin et Steve Allen ont terminé les travaux entrepris par Samuel Moukouri pour développer les programmes pouvant analyser les données Monte Carlo en temps imaginaire pour en extraire, par une méthode de prolongement analytique dite "d'entropie maximum", les propriétés en fréquence réelle. Un grand nombre de projets ont été rendus possibles grâce à ces programmes.
Dans ce travail plutôt formel, nous avons présenté une dérivation de notre approche non-perturbative qui met en lumière les ressemblances et les différences avec les approches dites conservatives. Nous employons la méthode des champs sources, (ou de dérivée fonctionnelle) développée par Martin-Schwinger-Kadanoff et Baym.
Nous avons montré comment interpréter correctement des résultats de simulations numériques qui prétendaient démontrer l'existence d'une transition de Mott même à couplage faible dans le modèle de Hubbard bi-dimensionnel. Le bien fondé de notre point de vue est vérifiable expérimentalement en mesurant la taille relative de la longueur de corrélation antiferromagnétique et de la longueur d'onde thermique de de Broglie.
Avec Jean-Sébastien Landry, stagiaire coop , nous avons entrepris une étude systématique de la susceptibilité supraconductrice de type d du modèle de Hubbard répulsif. Grâce à des moyens de calcul puissants, nos résultats couvrent une vaste gamme de paramètres. Nous observons un maximum de la susceptibilité à dopage fini. Une généralisation de l'approche que nous avons développée avec Vilk permet d'expliquer ces résultats numériques dans le domaine de couplage faible à intermédiaire (voir ci-dessous).
Bien que la méthode développée avec Yury Vilk et Steve Allen permette de décrire assez précisément les fluctuations dominantes, telles les fluctuations de paire dans le modèle de Hubbard attractif, les canaux non-singuliers sont plus difficiles à calculer de façon fiable. Avec Bumsoo Kyung et Steve Allen, nous avons trouvé une façon d'utiliser la symétrie de croisement pour calculer la susceptibilité de spin et celle de charge dans le modèle attractif. Ces résultats peuvent maintenant être généralisés au cas du modèle de Hubbard répulsif, tel que décrit dans le paragraphe suivant.
Les canaux non-dominants dans le modèle de Hubbard répulsif sont les canaux supraconducteurs, ce qui indique l'importance de réussir à faire ce calcul, tel que mentionné au paragraphe précédent. Nous touchons à un problème qui va au coeur de la supraconductivité à haute température. Les résultats analytiques obtenus avec Bumsoo Kyung sont en accord quantitatif avec les simulations de Jean-Sébastien Landry, mentionnées ci-haut. Notre approche permet d'obtenir un estimé de la température de transition supraconductrice qui est en forme de dôme en fonction du dopage. Loin du demi-remplissage la température de transition augmente lorsqu'on réduit le dopage à cause de l'augmentation des fluctuations antiferromagnétiques. En se rapprochant du demi-remplissage, ces fluctuations antiferromagnétiques créent un pseudogap qui fait chuter la température de transition supraconductrice. L'ajout des effets tri-dimensionnels permettra d'obtenir des résultats plus quantitatifs, entre autres pour la position de la transition de phase antiferromagnétique.
Les résultats du paragraphe précédent ont été obtenus dans le régime du couplage faible à intermédiaire. Or, les supraconducteurs à haute température sont plutôt dans la limite du couplage intermédiaire à fort. Il est possible d'obtenir une description phénoménologique dans ce régime de couplage en partant directement du modèle t-J, et en calculant les interactions effectives par des règles de somme. Les fonctions de corrélation entrant dans ces règles de somme sont à temps égal et à courte portée dans l'espace. Elles peuvent être estimées à partir de la théorie de champ moyen puisque nos études antérieures sur le modèle de Hubbard attractif avaient démontré que c'était une bonne façon d'estimer ces fonctions de corrélation. Cette approche, suggérée par Bumsoo Kyung, permet de trouver de bonnes valeurs pour le pseudogap et plusieurs autres quantités physiques mais n'est pas quantitative pour toutes les quantités observables.
Sébastien Roy, dans son mémoire de maîtrise, généralise l'approche de Yury Vilk pour calculer les propriétés thermodynamiques du modèle de Hubbard. Il y a deux façons d'obtenir la thermodynamique dans cette approche. En général les résultats concordent à quelque pourcent près. Lorsqu'il y a désaccord substantiel, les méthodes analytiques ne sont plus fiables, comme on peut le vérifier en comparant à des simulations Monte Carlo quantique. Le calcul de l'entropie permettra d'interpréter différentes mesures ainsi que le phénomène de localisation induite par la température et les interactions. Ce dernier phénomène avait été découvert pour tous les remplissages à deux dimensions par François Lemay dans sa thèse de doctorat et il avait été confirmé par des simulations Monte Carlo débutées par Jean-Sébastien Landry . Sébastien Roy vérifie aussi avec David Sénéchal la précision de la thermodynamique obtenue de la méthode de Théorie des Perturbations Inter-Amas développée par ce dernier.
Le stagiaire Alexis Gagné-Lebrun a entrepris le calcul de la densité d'états locale autour d'une impureté dans le modèle de Hubbard à l'aide de simulations Monte Carlo Quantique. La densité d'états locale est mesurable par spectroscopie par effet tunnel. La façon dont une impureté modifie la densité d'états locale en fonction de la distance à l'impureté donne des informations détaillées qui devraient nous renseigner sur la nature des impuretés et des interactions dans le milieu.
David Sénéchal a développé une méthode numérique, la Théorie des Perturbations Inter-Amas , basée sur une théorie des perturbations à couplage fort que nous avions mise au point il y a quelques années. Nous utilisons présentement cette approche pour comprendre comment sont modifiés les concepts liés à la surface de Fermi lorsque la proximité au demi-remplissage et la force des interactions invalide les concepts habituels, en particulier celui de liquide de Fermi.
Avec Maxim Mar'enko et Claude Bourbonnais, nous tentons d'interpréter des expériences faites dans le groupe de Poirier sur l'absorption ultrasonore dans les conducteurs organiques de la famille (BEDT-TTF)2X (phase kappa). Bien qu'il y ait une vaste littérature sur l'effet des fluctuations supraconductrices sur la conductivité, très peu de travaux ont porté jusqu'à maintenant sur l'absorption ultrasonore.
![]() |
![]() |
![]() |
3. Méthodologie | Recherche | 5. Collaborateurs |